Ce gouffre - entre l'imaginaire, le désir et le réel - est invivable.

En 2001 paraissait "Se perdre", extrait du journal d'Annie Ernaux, au moment où elle vécut une histoire amoureuse avec un diplomate russe, en 1989. Ce que je fais, encore, c'est pour lui, et je n'ai même pas le cœur à le faire: une préface sur le Tour de France, Apostrophe. Au menu cette semaine, des films garantis sans plateforme de streaming, de la lecture fraîche, gratuite et intégrale, des podcasts sur les soignants, de bons conseils pour bien travailler de chez soi et de quoi faire du bruit en soutien aux personnels soignants. Tout est difficile. « Se perdre » d'Annie Ernaux. Malheureusement, la sauce ne prend pas. Grosse déception pour moi en ce qui concerne ce livre. Tout n'est qu'attente. Annie Ernaux publie 300 pages de notes sans retouches sur le détail de sa liaison avec l'amant russe de «Passion simple»Dans Passion simple (1992), Annie Ernaux avait raconté sa liaison d'un an avec un homme marié et plus jeune qu'elle, rencontré lors d'un voyage en URSS. Je ne suis pas sûr qu'il y ait vraiment un intérêt à savoir qu'elle l'a sucé dans le hall ou qu'enfin il l'a sodomisée.

Ce n'est pas la première fois que cela m'apparaît mais ici, c'est encore plus marqué: lorsqu'elle parle de sexe, Annie Ernaux a tendance à perdre le côté neutre, blanc qui caractérise son écriture.

Mais Annie Ernaux est singulièrement plus pornographique que d’autres. Durant toute sa relation avec cet «amant de l'ombre», son journal intime a été son seul lien d'écriture, une façon aussi de supporter l'attente du prochain rendez-vous. C'est qu'en les relisant, elle y a vu «quelque chose de cru et de noir» qui lui paraissait devoir être aussi «porté au jour».
Le monde extérieur est pratiquement absent de ces pages répétitives où il n'est question que de ses échanges sexuels avec S., placés sous le signe de l'attente, des torturantes questions sans réponse, des rêves et des fantasmes, de la faim insatiable du corps de l'autre, de la jalousie, du sentiment de perdre son temps et des trop brefs moments de bonheur douloureux d'une liaison sans avenir: «La précarité donne une intensité absolue, violente, à ces rencontres», constate-t-elle.On ne saura pas grand-chose de S., en poste à l'ambassade d'URSS où il semble s'occuper d'activités culturelles assez mal définies, car il n'a rien d'un intellectuel: grand, blond, aimant le luxe et les voitures rapides, il énumère avec vanité les marques de ses vêtements (chemise Saint Laurent, cravate Cerruti, pantalon Ted Lapidus) – ce qui ne l'empêche pas de porter d'affreux slips soviétiques. (De la même façon, elle n'avait jamais pensé publier les pages du journal tenu durant la maladie d'Alzheimer de sa mère, comme s'il n'existait qu'une vérité, celle qu'elle avait tenté d'approcher dans Une Femme.) Les écrivains sont tous un peu pornographiques de nature.

Je ne saurai jamais non plus ce que j'ai été pour lui. "Se perdre" est la retranscription du journal intime d'Annie Ernaux, alors qu'elle vivait une passion avec un Russe. la formule? La Feuille Volante n°1078 – Octobre 2016 Se perdre – Annie Ernaux – Gallimard. Cette liaison, elle l'a décrite dans un ouvrage publié presque dix ans plus tôt, "Passion simple". Main Se perdre.
Please read our short guide how to send a book to Kindle. Rejoignez Babelio pour découvrir vos prochaines lectures Elle est dans l'exhibition, comme si elle avait quelque chose à prouver.

Résumé par Annie Ernaux, le bilan de leurs rencontres est sans complaisance: «Il baise, il boit de la vodka, il parle de Staline.» Mais encore il regarde l'émission Le juste prix sur TF1 et – détail qui tue – il conserve ses chaussettes pour faire l'amour…En déclarant à Apostrophes qu'«il n'y a pas que le bonheur qui rende heureux», Annie Ernaux a laissé sans voix ses interlocuteurs, à commencer par l'aimable Bernard Pivot, complètement pris de court. Vous aimez ce livre ? Il la considère comme … Cette perte du sens commun décrite, disséquée, analysée dans "Passion simple" nous est ici livrée brute, sans le regard un peu extérieur qu'offre le temps qui passe.