Au moment de la réunification, Ahidjo exerce déjà un quasi-monopole politique au Cameroun oriental. Crisis Group a eu accès à ces messages. Aux tensions communautaires se sont greffés autour des années 1980 le phénomène des coupeurs de route et celui des preneurs d’otages ainsi que des conflits fonciers. Tandis que le Premier ministre reconnait à Bamenda l’existence d’un problème anglophone et invite les syndicats au dialogue pour le résoudre, d’autres élites anglophones comme le ministre et secrétaire permanent du Conseil national de sécurité déclarent dans les médias à Yaoundé qu’il n’existe pas de problème anglophone. Une aggravation du problème anglophone pourrait affecter l’élection présidentielle et les élections générales prévues en 2018. Entretiens de Crisis Group, universitaires et hauts fonctionnaires originaires de l’Extrême-Nord, Yaoundé et Maroua, 2016.Entretiens de Crisis Group, groupes de fonctionnaires, 2015-2016.Contrairement à la guerre de Bakassi (1993-2002), le conflit contre Boko Haram a été largement médiatisé et suivi pratiquement en temps réel via les réseaux sociaux.Entretiens de Crisis Group, diplomates américains et européens, Yaoundé, mars 2016.D’après l’INS, il faudrait un taux de croissance nettement au-dessus de 7 pour cent pour faire reculer la pauvreté. Elle montre les limites du centralisme national, alors que la décentralisation, engagée en 1996, est peu effective. Bien qu’apparemment affaibli ou présenté comme tel depuis 2016, Boko Haram demeure un danger pour les populations de l’Extrême-Nord et une menace pour l’Etat camerounais et les forces de sécurité. Leurs frustrations se sont exprimées avec force fin 2016 lorsque des revendications corporatistes se sont transformées en demandes politiques, donnant lieu à des grèves et des émeutes. Synes : Syndicat national des enseignants du supérieur Si une solution durable n’est pas trouvée, la prochaine résurgence du problème anglophone pourrait être violente. Le déficit de légitimité des dirigeants anglophones concerne aussi, à un moindre degré, les chefs de l’opposition. Quels rôles jouent la diaspora anglophone et les acteurs religieux ? Les autorités traitaient le phénomène comme du banditisme, bien que des habitants de Goulfey et de Kousseri leur aient signalé qu’il s’agissait de Boko Haram.

Comprenant où se trouve le vrai pouvoir, les élites anglophones se livrent à une compétition interne pour s’assurer la meilleure position au niveau fédéral, se préoccupant davantage de plaire à Ahidjo que de défendre les populations anglophones. Comment est-elle perçue par la partie francophone ? Ensuite, cette crise prolonge la restriction des libertés publiques qui s’accentue depuis 2013 : interdiction des manifestations, arrestation et brutalisation des militants de partis politiques, journalistes et chercheurs. Au sein de la mouvance sécessionniste, des divergences persistent sur la stratégie et les modes opératoires. Boko Haram profite de la montée des eaux pour faire passer des armes par les îles de Tchol, Goulfey et Darak ou les micro-îles inondables du lac, non répertoriées. Entretiens de Crisis Group, universitaires et islamologues, Maroua et Kousseri, mars 2016. La part importante des Kanuri s’explique davantage par leurs vulnérabilités multiples (tradition d’islam rigoriste, que Boko Haram a su exploiter, pauvreté et faible scolarisation) et leurs liens avec le Nord-Est nigérian (proximité de la frontière, liens d’éducation coranique Les violences qui ont fait rage de novembre 2016 à janvier 2017 dans les deux régions anglophones du Cameroun et l’ampleur des opérations ville morte qui ont suivi montrent que le problème anglophone demeure profond. Il recrutera plus tard huit jeunes radicalisés et deviendra l’émir de Boko Haram dans la zone d’Afadé. Au Cameroun, des groupes d’autodéfense ou comités de vigilance existent depuis les années 1960, et à l’Extrême-Nord ces comités de vigilance ont été activés ou créés en juillet 2015, après les premiers attentats-suicides. Des règlements de comptes ont eu lieu via des dénonciations calomnieuses aux forces de sécurité. Entretiens de Crisis Group, élite et population anglophones, Nord-Ouest et Sud-Ouest, 2016-2017.Aux sources du problème anglophone : legs colonial et échec du projet centraliste Bien que le Cameroun ait été géré de fait par la France et le Royaume-Uni comme une colonie, il était plutôt, juridiquement, un territoire administré. Pour lui, seul le Cameroun occidental constitue dès lors un véritable obstacle à son projet hégémonique. », op. Malgré les critiques, beaucoup de Camerounais pensent que Biya a fait face à Boko Haram de manière adéquate. A l’Extrême-Nord, la très grande majorité des musulmans, y compris intégristes, rejettent Boko Haram. Plusieurs policiers francophones ont dit être certains que des policiers anglophones étaient solidaires de la cause anglophone. Entretiens de Crisis Group, Fotokol, avril 2016.

Les opérations extérieures du BIR-Alpha sont baptisées « Arrow » et « Blue Pipe » et celles d’Emergence 4 « Tentacules ». « Motivations and Empty Promises: Voices of Former Boko Haram Combatants and Nigerian Youth », Mercy Corps, avril 2016 ; « Joining and Leaving Boko Haram : Perspectives from Former Members », Agence des Etats-Unis pour le développement international (USAID), 8 juin 2015.Barnawi a été arrêté en avril 2016 par les forces de sécurité nigérianes dans l’Etat de Kogi, loin du Cameroun. Quand les Nigérians réclamaient le droit de poursuite, des hauts gradés camerounais y voyaient un stratagème pour s’implanter à l’Extrême-Nord. Saïbou Issa, « Arithmétique ethnique et compétition politique entre Kotoko et Arabes Choa… », Le BIR est une force d’élite créée en 2001 pour lutter contre les coupeurs de route, et qui dépend de la présidence. Le gouvernement, quant à lui, estimait que les syndicats avaient un agenda caché visant la sécession, et ne cessaient, pour cette raison, de rallonger leur liste de revendications. Face à Boko Haram, le gouvernement a d’abord adopté une stratégie de déni. Un ancien étudiant camerounais au Soudan raconte avoir vu certains camarades nigérians et camerounais se radicaliser et les premières cellules se constituer après la mort de Yusuf.